mercredi 23 avril 2008

la descente d'Enée aux enfers

Proposition de traduction.

Ils allaient obscurs dans la nuit solitaire à travers l ‘ombre et à travers les demeures vides de Pluton et les royaumes vains : tel est le chemin dans les forêts sous une lune incertaine, sous une lumière faible quand Jupiter a caché le ciel dans l’ombre et qu’une nuit noire a enlevé les couleurs aux choses. A l’entrée elle-même, aux premières portes étroites d’Orcus, le Deuil et les Remords/Soucis vengeurs ont installé leurs lits, les pâles Maladies et la triste Vieillesse y habitent, et la Crainte, et la Faim qui est mauvaise conseillère et la pauvreté honteuse des formes terribles à voir et la Mort et la Souffrance, et les mauvaises Joies de l’esprit, et la Guerre qui apporte la mort sur le seuil en face/ adverse, et les chambres des Euménides qui osnt de fer et la folle discorde, sa chevelure de vipère retenue avec des bandelettes sanglantes. Au milieu, un orme opaque immense étale ses rameaux et ses branches chargées d’années, demeure que dit-on occupent les vains Songes confusément et sous les feuilles duquel ils sont fixés. En outre, il y a toujours beaucoup de monstres, des bêtes sauvages variées, les Centaures séjournent devant les portes les Sybille difformes et Briarée aux cent bras, et la bête monstrueuse de Lerne, sifflant horriblement, la Chimère armée de flammes, les Gorgones, les Harpies et les ombres qui ont une forme de trois corps. Ici Enée, tremblant d’une épouvante soudaine, saisit son épée (et) en présentant la pointe aiguisée à ceux qui viennent (et) si sa docte compagne ne l’avertissait pas que des ombres ténues et sans forme volent ca et là, il se précipiterait et frapperait des ombres en vain avec son glaive. de là part une voie qui mène du tartare aux ondes de l’Achéron. Ici il y a un gouffre fangeux, vaste abîme qui bouillonne et qui vomit tout le limon du Cocyte. Un terrible passeur garde ces eaux et ces fleuves, Charon, d’une saleté repoussante, à qui une énorme barbe blanche négligée tombe de son menton, ses yeux de flamme sont fixes, un manteau sale est suspendu à ses épaules par un noeud. Il fait lui même avancer la barque avec une gaffe et manoeuvre les voiles, et il transporte les corps dans une barque couleur de rouille, il est déjà assez âgée, mais sa vieillesse est vigoureuse et robuste quand il s’agit d’un dieu. Là toute une foule se rendait sur les rives, des mères et des époux, les corps privés de vie des héros magnanimes, des jeunes garçons et des jeunes filles encore vierges, et des hommes jeunes sur mis sur le bûcher sous les yeux de leurs parents : aussi nombreux que les feuilles qui tombent en glissant dans les bois aux premiers froids de l’automne, ou aussi nombreux que les oiseaux qui, des gouffres de la mer, se rassemblent vers la terre quand la froide saison les fait fuir au delà de la mer et les envoie vers des terres ensoleillées. Ils se tenaient debout, suppliant de pouvoir traverser les premiers le fleuve, et tendaient les mains dans leur désir de l’autre rive. Mais le triste cocher accepte tantôt ceux-ci, tantôt cela, et il repousse les autres loin du rivage. Enée, ému et étonné par ce tumulte, dit : « Dis-moi, O vierge, que signifie ce rassemblement au bord du fleuve ? Et que veulent/vont chercher ces âmes ? Par quels choix celles-ci sont éloignées des rives et les autres balaient les flots livides avec leurs rames ? » La prêtresse au grand âge lui répondit : «  fils d’Anchise, descendance très certaine des dieux, tu vois les étangs profonds du Cocyte et les marais du Styx, dont les dieux de parjurer et de tromper la puissance divine : toute cette foule que tu vois est sans ressources et sans sépultures ; et lui, c’est le passeur Charon, et ceux-ci que l’onde transporte, ce sont ceux qui ont été ensevelis. »


Proposition de commentaire (de Thomas, chacun devra chercher les éléments, nous n'apportons que le plan)

Introduction :  suggestion d'amorce :- évoquons le rapport intime que le projet de l'Enéide entretient avec l'œuvre d'Homère (Iliade et Odyssée)

                                                           -rappelons la fonction fondatrice que Virgile(-70;-19) entend conférer à cet ouvrage de douze chants quant à l'histoire de Rome, fonction qui s'éclaire à l'aune des rapports étroits qu'entretenait Virgile avec l'empereur Auguste

                        Concernant le passage à proprement parler, si sa longueur me semble rendre improbable une exigence de commentaire exhaustif, il me parait possible de dégager trois axes majeurs, lesquels m'apparaissent plus intéressants à développer qu'une analyse linéaire quoiqu'un tel commentaire reste envisageable.

                       A savoir I  Une évocation des enfers (axe potentiellement très riche tant le passage comporte d'éléments y ayant trait : il conviendrait de dégager les caractéristiques principales de lieu tant sur le plan géographique (lieux, "habitants"-dieux,allégories et morts), que sur celui de l'atmosphère (eau, noirceur,…)

                                        II Un vivant chez les morts (il convient ici de montrer que l'évocation des enfers préalablement commentée est le produit d'une focalisation interne –on s'attarde donc d'abord sur la technique descriptive de Virgile- à partir du personnage d'Enée ; on répertorie et commente ensuite les réactions successives du vivant face aux morts en insistant notamment sur les émotions d'une part et sur les champs lexicaux antithétiques ainsi que les registres)

                                        III La visée du texte ( on retiendra ici la double dimension didactique de l'extrait : visée informative d'une part dans le sens où le passage d'Enée dans les enfers permet à Virgile de traiter de la question métaphysique incontournable "Que se passe-t-il donc après la mort ?" et ce notamment au travers des questions d'Enée à la fin du passage ; d'autre part,visée laudative par laquelle on retrouve la grandeur du personnage d'Enée dans cet acte de bravoure et par suite éloge de Rome- qui par l'entremise d'Enée a connu et affronté au sens premier du terme le monde des morts et ses allégories funestes)

 

Conclusion :- rappeler les lignes de force majeures du passage

                     -ouverture suggérée : rappelons les diverses évocations des enfers dans la littérature antique (Homère dans l'Odyssée –catabase d'Ulysse- ou encore Platon dans lePhédon par le biais d'un mythe eschatologique) et dans la littérature moderne par Dante in La divine comédie ou encore beaucoup plus récemment l'allusion métaphorique à Charon dans La modification de Michel Butor.

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