La colère d'un dieu te poursuit, tu expies de grandes fautes commises, le malheureux Orphée appelle sur toi ce châtiment à cause d'un malheur qu'il ne méritait nullement, à moins que le destin ne s'y oppose, il te punit sévèrement pour l'épouse qui lui a été enlevée. En effet, celle-ci tandis qu'elle te fuyait le long du fleuve tête baissée, la jeune fille allant mourir, ne vit pas le serpent monstrueux qui habitait ces rives, à ses pied, dans l'herbe haute.Le choeur des dryades de même âge qu'elle, emplit de son cri le sommet des montagnes. Lui-même, apaisant son douloureux amour, il te chantait avec lui-même, sur le rivage solitaire, le jour naissant ou au déclin de la journée, douce épouse.
Proposition de commentaire
Introduction
=>comme d'habitude
=> Cf supra sur Virgile
=> Ce texte s'articule autour de trois éléments remarquables : d'une part un art du récit poétique maîtrisée entièrement par Virgile et d'autre part l'influence du destin et des dieux sur notre vie à placer en parallèle avec la naissance de la poésie
I. l'art du récit
a/- Après une courte introduction, Virgile attaque d'emblée le récit (à partir du v 5) ; le décor est planté rapidement : Protée explique succinctement pourquoi Aristée est poursuivi
- Opposition entre le mouvement et l'immobile. Orphée court "praeceps"+allitération en "m" qui rappellent qqch de fluide / le serpent, obstacle statique "ante pedes"+allitération en "r" v 11 et assonances en "a" v 7, ie qqch sur lequel on bute car les "a" sont longs (marque de l'ablatif, CCL)
- La mort de la jeune fille n'est pas racontée mais annoncée par le "chorus Dryadum" => donne l'impression de qqch d'inéluctable, le cri de toutes les créatures vivantes fait prendre acte au lecteur de la mort de la jeune fille.
b/- Souci du détail ; lieu de l'action, nombreux adj sur la lyre
- Récit vif par l'emploi du parfait
- Litote du premier vers et emploi de l'allitération en "m" met en évidence les procédés rhétoriques employés à mettre en relation avec l'apostrophe "te" au vocatif, avant la coupe bucolique ou juste après, qui permet à l'auteur d'appuyer dessus.
-Registre pathétique et tension dramatique (chagrin d'Orphée et course d'Eurydice)
-Enfin focalisation interne par les yeux d'Orphée à la fin du poème, qui permet une identification du lecteur au chagrin du poète.
II. Le châtiment divin
a/- champ lexical évident du destin et des dieux "numinis" ainsi que de la vengeance "irae", "poenas" (irae en position de spondée obligatoire)
=> les actions d'Aristée sont punies par les dieux qui prennent le parti d'Orphée (mise en parallèle "numinis irae" et "miserabilis Orpheus" -avec Orpheus en position de spondée obligatoire)
b/ Si Aristée est poursuivi par les dieux du fait de sa responsabilité, le destin en revanche s'acharne sur Orphée et Eurydice.
- Orphée est d'emblée touché par le destin "miserabilis", d'autant qu' "haudquaquam ob meritum"
- Avant que le choeur n'annonce la mort d'Eurydice, on sait qu'elle doit mourir par le participe futur "moritura".
=> Toutes les actions des hommes sont donc régies par le destin sur lequel même les dieux n'ont pas prise. En effet, le seul espoir d'Aristée est que son destin soit de ne plus être pourchassé par les dieux "ni fata resistant"
III La naissance de la Poésie et de la Musique
- description de la confection de la lyre
- Le deuil, comme dans toute la Grèce antique est chanté (on peut songer aux pleureuses de l'Antiquité)
- Par opposition au récit, c'est l'imparfait qui est ici employé "canebat". Mis en relation avec l'anaphore des ablatifs absolus "te veniente die" et "te decedente", Virgile montre que l'action dure longtemps.
- L'adjonction de "te" montre que son deuil est éternel.
=> Naissance du poète dans la douleur
CCl Dans un récit original, au déroulement maîtrisé, Virgile montre la faiblesse des hommes et même des dieux face au destin qui conduit toute vie humaine. Cependant, cette expression de la douleur permet l'avènement de la poésie, non pas pour oublier mais pour célébrer.
=> On peut identifier ainsi l'une des missions de la poésie selon Virgile : chanter la vie, accepter son chagrin comme une manifestation du destin.
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